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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/169

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juste confiance ; mais, à partir du 21 janvier, les changements de rumbs devinrent fréquents ; des calmes et des bourraques se succédèrent de façon à ralentir indéfiniment une marche dans laquelle le moindre retard était un danger.

À chaque instant, la Niña devait diminuer de toile pour attendre la Pinta, qui n’allait presque plus qu’à la bouline.

Quinze jours plus tard cependant les pilotes se croyaient très près de l’Espagne, Colomb soutint qu’ils se trompaient de cent cinquante lieues, et l’événement ne lui donna que trop raison. À l’heure où, d’après leur estime, ils auraient dû se trouver à l’abri d’un port, ils virent fondre sur eux une tempête, qui, pendant trois fois vingt-quatre heures, les tint sans relâche en face de la mort.

La Pinta, hors d’état d’aller au plus près, avait dû fuir sous le vent. Une fois elle répondit au signal nocturne de la Niña ; mais bientôt elle disparut dans la nuit.

Enfin le danger devint si pressant, que l’Amiral dut confier à la mer le détail écrit de sa découverte, avec toutes les précautions usitées en ces cas extrêmes.

Ce devoir rempli, Colomb, un moment abattu, sentit renaître en soi une confiance qui ne devait pas plus le tromper cette fois qu’elle ne l’avait fait jusqu’alors.

Le vendredi 15, on reconnut une terre où les pilotes virent les côtes d’Espagne, mais que l’Amiral déclara être une des îles Açores.

L’Amiral avait encore raison ; mais ce qui dut moins le flatter, c’est que cette île de Sainte-Marie, où il lui fallait de toute nécessité relâcher, appartenait au roi de Portugal, à un prince, dont, plus que jamais, il devait redouter la malveillance.