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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/187

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arcs, flèches, zagaies, casse-têtes admirablement travaillés dans un bois lourd et dur comme du fer ; meubles divers aussi solides que légers ; instruments de musique, les uns à percussion, les autres à vent, et, parmi ceux-ci, la double flûte des anciens, cette même flûte incompréhensible pour nous, et dans laquelle, cependant soufflaient des deux narines les contemporaines de Périclès, comme les sujettes d’Anacoana.

Tandis que les armes attiraient principalement l’attention des hommes, les femmes admiraient de volumineux et légers trophées, composés d’écharpes aux couleurs douces et fondues comme celles de l’arc-en-ciel ; des sortes de mantilles faites de plumes d’oiseaux, de blanches et fines naguas, robes à mille plis et trainantes, mais sans manches ni corsages. — Comment des sauvagesses, des idolàtres, avaient-elles pu concevoir et exécuter de si gracieuses parures !

Et ces colliers, ces diadèmes en plumage de colibri ! Et ces corbeilles, ces jolis paniers à ouvrage aux couleurs si habilement assorties, d’un tissu si fin, si serré, qu’ils pouvaient contenir de l’eau sans en laisser filtrer une goutte.

On aurait pu répondre aux dames de Barcelone que ces derniers objets n’étaient pas d’un usage très commun dans le pays même d’où ils venaient. C’était la fleur de l’industrie du nouveau monde offerte à la reine de Castille par la reine de Cibao, à la fleur de Grenade par la Fleur d’or. Travaillés par des mains de femmes, ils contrastaient avec nombre de ces zémés qui font de plus en plus irruption dans nos musées d’où ils finiront par chasser les Muses, de ces hideuses et grossières idoles devant lesquelles on n’osera bientôt plus dire qu’Apollon et Minerve sont de faux dieux.