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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/198

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il se leva en pleine nuit, guéri, fit passer à toute la flotte l’ordre de lever l’ancre, et commanda lui-même à son bord les premières manœuvres d’appareillage. Déjà, pour ne point risquer de perdre du temps, l’escadre était sortie du port et se tenait mouillée en rade.

Cette belle et spacieuse rade de Cadix fut alors le théâtre de la plus imposante scène navale qui se fût encore déployée dans ses eaux. En un instant une foule immense couronna la ligne des fortifications, et le cordon de maisons blanches qui s’étend au-dessus de cette ligne d’un vert sombre, et aussi la pointe de Saint-Sébastien, et la longue plate-bande de la Isla, jusqu’aux crêtes de ces îlots rocheux qui s’appellent le Diamant et les Pourceaux.

Au loin, les trois caraques et les dix-sept caravelles se dessinaient crûment sur un ciel à peine blanchi par les premières lueurs de l’aube, et entre la ville et la flotte, une immense nappe d’un bleu sombre, marquetée de reflets d’argent, disparaissait par places sous des milliers d’embarcations aux formes variées, felouques, bateaux de pêche, bombottes, canots de plaisance, vieilles galères, balancelles, tartanes, en un mot tout ce qu’avaient pu fournir de véhicules à voiles ou à rames, non seulement le port de Cadix, mais encore ceux de Sainte-Marie, de Roda, et toute la côte andalouse de l’embouchure du Guadalquivir à la baie de Trafalgar.

Autour de chacun des dix-sept navires bondissait comme un troupeau de canots chargés, les uns d’amis, de parents, de curieux, de femmes de toute condition ; les autres, de citrons, oranges, grenades, pastèques et autres comestibles frais, qu’achetaient au dernier moment les marins et les passagers de l’escadre.

Au milieu d’une telle confusion, l’on eût pu voir, si chacun