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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/81

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carrousels, voilà où la patience de Colomb était soumise à des épreuves auxquelles sa dignité devait lui imposer finalement de se dérober.

Cette résolution prise, on devine aisément où il alla d’abord chercher des consolations.

Le père gardien l’attendait. Quatre années s’étaient écoulées depuis leur séparation, lorsqu’il donna de nouveau le baiser de paix, lorsqu’il rouvrit l’asile de la prière à cette grande âme toujours en peine. La douleur du bon père égalait celle de son hôte, avec un surcroit de confusion et presque de remords : n’était-ce pas lui qui avait affermi dans l’esprit de Colomb cette confiance que la reine avait si peu justifiée ?

Colomb, à cet égard, s’empressa de la disculper : il ne se plaignait point d’Isabelle, en qui il avait toujours cru, et dont il comprenait les embarras et les préoccupations de tout genre. Moins que jamais, il doutait des intentions, des promesses d’une si noble femme, d’une si sainte reine ; mais, ne voyant pas que les circonstances pussent de longtemps le seconder, il inclinait à se rendre, soit en Angleterre où il avait noué quelques relations, par l’entremise de son frère Barthélemy, soit près du roi de France Charles VIII, de qui ses propositions avaient depuis peu reçu un accueil favorable.

Le père de Marchena n’hésita pas à combattre des projets que, dans sa foi au génie de Colomb, il jugeait aussi funestes pour ses souverains que pour son pays. Il insinua que Charles VIII était sans doute un prince très aventureux, très brave, très brillant, mais qu’il était aussi bien jeune, et accusant dans sa conduite toute la légèreté de son âge… et de sa nation : ennemi de l’Italie, en