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Page:Benjamin - Grandgoujon, 1919.djvu/255

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GRANDGOUJON

Grandgoujon dut suivre l’infirmier, qui le ramena au dortoir. Le fou de droite hurlait : « Si t’étais une bonne sœur, comme bonne sœur, j’te fouterais par la fenêtre ! » Écœuré, Grandgoujon se recoula dans ses draps, refusa toute nourriture et rongea son frein. Dans l’après-midi, un caporal lui tapa l’épaule :

— Le soldat Grandgoujon, c’est toi ?

Il grogna :

— Et après ?

— J’apporte ton paquetage. Tu peux filer.

— Où ?

— Les docteurs, à présent, veulent qu’tu les débarrasses. La bagnole t’attend. Tu rentres à la section.

Il ne saisissait plus : le métier militaire devenait un mystère étonnant ; mais, il s’habilla en hâte. Ils descendirent, passèrent devant le poste. Le caporal cria : « Sortant ! » La voiture datant de Louvois attendait à la porte. Le caporal aida Grandgoujon à s’y hisser avec ses frusques et, dix minutes plus tard, il arrivait à l’École Militaire.

— Votre billet de rentrée ? dit le sergent de garde.

— Je viens du Val-de-Grâce.

— Alors, du Val, avez-vous un billet de sortie ?

— Non, reprit confidentiellement Grandgoujon, ils ont gaffé avec moi… et… ils me réexpédient en douce.

— Quoi ? fit le sergent, dont l’haleine sentait le mauvais apéritif, qui vous permet de porter des jugements, dites donc ? Je n’aime pas ce