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Page:Benjamin - Grandgoujon, 1919.djvu/52

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GRANDGOUJON

guerre. Si elle s’en va, nous n’en retrouverons jamais. Toutes font des munitions.

— Voilà un mois qu’elle ne fiche rien !

— Si. À déjeuner…

— Nous étions seuls.

— À la cuisine elle avait un neveu.

— À elle ?

— Il est en permission. Elle l’a reçu avec sa nièce et les quatre enfants. Je ne peux pas, ce soir…

— Ça, c’est…

— Chut !… Bon comme tu es…

Il eut un nouveau soupir :

— Ça commence à me tuer d’être bon !

— Va dîner avec Monsieur Colomb au restaurant.

— Et toi, tu te morfondras ici comme une croûte de pain derrière une malle ?

Il commençait à voir rouge.

— J’ai retenu Madame Creveau, fit sa mère.

— Ah ? Elle, elle dîne ?

Il grinça des dents.

— Elle, reprit Madame Grandgoujon, ne veut même pas qu’on change son assiette.

— Ça c’est ignoble !

— Mariette va nous entendre.

Elle le poussait vers le bureau :

— Alors, chéri, tu es monté au-dessus ?

Brusquement il s’apaisa, puis, s’essuyant le front :

— Et cette femme est étonnante !… Et le mari est laid… mais il est étonnant aussi !