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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/122

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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

elle se rendit si importune, que le capitaine, à qui son père l’avait recommandée, pria la da de faire cesser cette scène.

« Elle sera mieux en bas, dit-il, et du moins ne se donnera pas en spectacle. »

Malgré la vigoureuse défense de Yette qui la pinçait, l’égratignait et se tordait avec de véritables convulsions, la da, éplorée elle-même, emporta sa petite maîtresse dans la cabine. Il faut avoir habité ces cases étroites et presque privées d’air pour savoir combien on y est mal. Tout le beau courage dont Yette s’était armée s’évanouissait devant les réalités désagréables du voyage, et surtout devant la certitude que chacun des plongeons de cet odieux vaisseau l’éloignait de ses parents. Elle voulait les revoir, les revoir tout de suite, exigeant ainsi l’impossible et s’en prenant de tout à la pauvre da, qui, le madras arraché de sa tête crépue et les vêtements déchirés par la griffe de cette terrible enfant, présentait une image grotesque et lamentable à la fois du désordre et de l’ahurissement.

« Je ne veux pas partir ! répétait sans cesse Yette, je ne veux pas être partie, j’aime mieux mourir ! »

Comme elle prononçait ces mots, il lui sembla