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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/16

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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

— Comment ! tu as été encore dans le parc à mulets ?

— Pardon, maman, ne vous fâchez pas, je n’ai sauté que sur un seul, et puis, autant vous le dire tout de suite, nous sommes restés longtemps dans la savane à taquiner les bœufs. Ils sont si gentils qu’ils se laissent faire.

— C’est tout ? demanda la mère d’un air de doute.

— Non, maman, dit Yette les yeux baissés sur la déchirure de sa robe.

— Je vois, vous avez encore pillé les fruits. Yette, ne deviendras-tu donc jamais raisonnable ? Sais-tu ce que me disait ton père tout à l’heure ? Qu’il faudrait au plus tôt t’envoyer en France, dans quelque pensionnat où l’on viendrait à bout de tes entêtements, de tes colères, de tout ce qui fait de toi une fille plus insupportable que deux garçons mal élevés. »

Aux mots de France et de pensionnat, Mlle Yette fondit en larmes ; deux ou trois petits nègres, qui avaient leurs entrées dans la maison et que le parfum du déjeuner avait attirés autour de la table, enfoncèrent leurs poings dans leurs yeux avec de sourds gémissements.

Les cris d’un autre enfant, partis soudain de