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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/239

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LA PETITE MAMAN.

pas nécessaire d’en parler à ses pupilles. S’étant concerté avec sa femme, qui, si elle avait peu d’esprit et de bon sens, ne manquait pas du moins de générosité dans les grandes circonstances, il annonça brièvement à Mlle Aubry que désormais il prenait la charge des deux orphelines.

« C’est un devoir que j’aurais réclamé si vous ne m’eussiez devancée, répondit cette dernière avec une égale simplicité ; mais mon tour viendra de les obliger. J’espère que vous me les laisserez jusqu’à la fin de leurs études.

— Cela va sans dire. Où seraient-elles mieux qu’auprès de vous ? »

Instinctivement et bien qu’elle ne pût deviner l’étendue de leurs bontés à son égard, Yette, dès ce moment, alla plus volontiers chez les Darcey. Elle leur était surtout reconnaissante d’aimer Cora. Yette était devenue du jour au lendemain une mère, uniquement préoccupée du bien de son enfant à qui elle sacrifiait tous ses propres goûts. Sur cette enfant son cœur chaleureux concentra toute l’affection qu’il avait longtemps partagée entre trois personnes ; elle se défendit cependant de la gâter, toute fière qu’elle était de sa gentillesse, car elle se rappelait combien un excès d’indulgence lui avait été funeste à elle-même ; elle