Aller au contenu

Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/272

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

226
HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

Cora et qu’il lui est très attaché, répondit Yette pensive. Qui sait si en effet Cora ne le récompensera pas un jour au centuple de sa bonté pour elle ? »

Quelle était l’idée de Yette ? Qu’espérait-elle de l’avenir pour cette sœur chérie ? Nous n’essaierons pas plus que Mlle Aubry de le deviner. Toujours est-il que le bonheur de Cora fut la seule ambition dont se bercèrent les dix-huit ans de cette excellente fille. Je me trompe, elle en avait une autre plus facilement réalisable, l’indépendance relative, le droit d’avoir un chez elle, un foyer, de pouvoir placer dans un nid qui lui appartînt les chères reliques qu’elle tenait de sa mère. Depuis dix années elle n’avait possédé rien en propre ; le règlement de la pension ne le permettait pas. Secouer le règlement après avoir su s’y soumettre, respirer enfin plus à l’aise, voilà quel était le désir secret de Yette. Ce désir s’accomplit le jour où elle eut obtenu son brevet d’institutrice. Ce jour-là, M. Darcey dit à sa femme :

« J’ai tout arrangé avec Mlle Aubry. Il y a dans sa maison, au quatrième étage, un appartement de trois pièces qu’on louait autrefois à des pensionnaires en chambre. Ce petit nid est très habi-