Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/330

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cle sur Brascassat… Niez-la, l’action mystérieuse des astres !

Je renonçai à une lutte, où j’étais faible soldat, du reste, et que je n’avais entreprise, en somme, que pour le distraire des affres de son obsession et contre-balancer la clapette. Peut-être ce système de penser sans cesse à la mort, qui est celui des moines et des philosophes, est-il le plus sage, et, qui sait, le plus apaisant ? On ne s’expliquerait pas autrement que les grandes cervelles du genre humain se fussent rencontrées pour l’adopter sous toutes les latitudes, à toute époque, avec un courage unanime. « Vis avec la mort », dit le proverbe oriental. Il n’y a guère de poètes qui n’aient, comme Lamartine, salué « la libératrice céleste ». Toujours est-il que Théophile Gautier, qui, sa vie entière, porta son cercueil sous le bras, dut à cette habitude de pouvoir s’y allonger, l’heure venue, paisiblement. Je l’ai vu s’éteindre dans son fauteuil, les yeux pudiquement clos devant la pâle visiteuse. Il l’attendait depuis soixante et un ans, et elle ne paraissait l’avoir surpris que par son retard. On eût dit qu’il le lui disait.