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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/392

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cet hippopotame à face humaine qu’on appelait Lepeintre jeune ? Voici ce qu’en écrit un contemporain : « Mirabeau-Tonneau était une mauviette auprès de Lepeintre jeune : le menton lui descend à triple étage sur la poitrine, et cela ressemble au péristyle d’une cathédrale. Ses joues sont massives comme celles d’un triton qui souffle de la conque ; sa tête est un obus ; les épaules qui la portent ont la carrure de l’Atlas, et son abdomen absorbe dans le tambour de l’étoffe les deux tiers de ses jambes… C’est moins un homme qu’une baudruche d’homme… » (Biographie des acteurs de Paris.)

Si c’était Lepeintre jeune qui réalisait Géronte, le personnage du valet Frontin était tenu par un certain Lafont, doué d’un physique admirable qui paraît avoir été, au théâtre comme à la ville, le type de l’homme à femmes : « Lovelace, Lauzun et Casanova », dit la même biographie. Est-ce le Lafont que ceux de ma génération ont encore pu voir au Gymnase dans Le Père prodigue, de Dumas fils, et le Montjoie, d’Octave Feuillet ? C’est ce que j’ignore, mais ce qu’il y a de certain, c’est que, s’il avait contenté l’auteur et le public dans ce rôle, Cadet ne pouvait y être que déplacé.

L’histoire n’a gardé que le nom du Neuville qui fut chargé de vivifier Champagne, autre valet du répertoire et pur ivrogne classique où Georges Berr, à la Comédie, était incomparable. Or, ce fut dans ce personnage secondaire de Champagne que Rodolpho conquit sa gloire et mérita d’être immortalisé par Théodore de Banville. Son succès fut tel que, le lendemain, il avait des directeurs à sa porte, « avec des mulets chargés d’or ». Mais à cette époque