Aller au contenu

Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/191

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

l’original, mais les dimensions de la toile prises, longueur sur largeur, aidaient les bonnes gens à s’y reconnaître. D’ailleurs il y avait les eaux-fortes où les signatures étaient impeccablement fac-similées.

Ce travail achevé, je m’en allais chez moi résumer en une préface, exclusivement laudative, les mérites, vus d’ensemble, de la collection. Là était le chiendent, car c’était à cette page de haute écriture que pendait le billet de mille.

Si riche que soit un lexique, fût-ce celui de Théophile Gautier ou de Paul de Saint-Victor, Crésus du verbe, il y a un moment où la hotte aux adjectifs se renverse. Le bois manque au foyer de l’enthousiasme. On n’imagine pas cependant une « vue d’ensemble » où le bonimenteur n’admirerait pas sans réserves tous les numéros d’une collection et graduerait la pâmoison. Ce serait un fichu bonimenteur, à cent francs la préface. On n’est pas libre comme au Louvre dans une galerie particulière.

— Monsieur, me jeta sévèrement un jour le tailleur Laurent Richard chez qui je prenais des notes, vous avez vu mes six Corot, mes cinq Millet, mes quatre Troyon, mes Diaz, mes Ziem, mes Daubigny sans nombre et mes Théodore Rousseau sans pareils, j’espère. Je ne vous demande pas de me dire quels sont ceux que vous préférez.

— Je les préfère tous, m’écriai-je en ravageant le ciel d’un geste désordonné.

Le catalogue était cette fois de soixante-quinze louis qui font autant de napoléons selon les règnes. Mais j’y employai huit jours, à celui-là, et j’y utilisai jusqu’à des mots de la langue romane ! On pouvait lire les six éloges des six Corot en commençant par