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Page:Bergson - Le Rire.djvu/87

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aussi bien rester extérieurs à ce qui se passe, pourvu que nous conservions la sensation bien nette d’un agencement mécanique. C’est ce qui arrive dans les cas où un personnage oscille entre deux partis opposés à prendre, chacun de ces deux partis le tirant à lui tour à tour : tel, Panurge demandant à Pierre et à Paul s’il doit se marier. Remarquons que l’auteur comique a soin alors de personnifier les deux partis contraires. À défaut du spectateur, il faut au moins des acteurs pour tenir les ficelles.

Tout le sérieux de la vie lui vient de notre liberté. Les sentiments que nous avons mûris, les passions que nous avons couvées, les actions que nous avons délibérées, arrêtées, exécutées, enfin ce qui vient de nous et ce qui est bien nôtre, voilà ce qui donne à la vie son allure quelquefois dramatique et généralement grave. Que faudrait-il pour transformer tout cela en comédie ? Il faudrait se figurer que la liberté apparente recouvre un jeu de ficelles, et que nous sommes ici-bas, comme dit le poète,

… d’humbles marionnettes
Dont le fil est aux mains de la Nécessité.