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Page:Berlioz - À travers chants, 1862.djvu/280

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que La Fontaine eût approuvée sans doute, si quelqu’un l’avait eue de son vivant. »

Avouez, avouez, avouez donc que, témoins d’une pareille abomination littéraire, bien loin de faire comme ces juges complaisants, toujours prêts à soutenir les insulteurs contre l’insulté, vous demanderiez pour ce lecteur de la Fontaine

Un cabanon
À Charenton.

Eh bien, c’est cela, et plus encore que l’on fait journellement en musique.

Ce n’est pas que tous les compositeurs s’indignent ouvertement d’être corrigés par leurs interprètes. Rossini, par exemple, semble heureux d’entendre parler des changements, des broderies et des mille vilenies que les chanteurs introduisent dans ses airs.

« Ma musique n’est pas encore faite, disait un jour le terrible railleur ; on y travaille. Mais ce n’est que le jour où il n’y restera plus rien de moi qu’elle aura acquis toute sa valeur. »

À la dernière répétition d’un opéra nouveau :

« Ce passage ne me va pas, dit naïvement un chanteur, il faut que je le change. — Oui, répliqua l’auteur, mettez quelque autre chose à la place. Chantez la Marseillaise. » Ces ironies, si âcres qu’elles soient, ne remédieront pas au mal. Les compositeurs ont tort de plaisanter à ce sujet ; les chanteurs ne manquant pas alors de dire : « Il a ri, il est désarmé. » Il faut être armé, au contraire, et ne pas rire ................

Autre exemple en sens inverse et pourtant analogue.

Un célèbre chef d’orchestre, qui passait pour vénérer profondément Beethoven, prenait néanmoins avec ses œuvres de déplorables libertés.

Un jour il entra le visage très-animé dans un café où je me trouvais.