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Page:Berlioz - À travers chants, 1862.djvu/309

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À TRAVERS CHANTS

Le dernier retour de la phrase vocale, au grand tutti, est plus énergique encore que tout ce qui précède, grâce à l’intervention d’un dessin des basses exécutant huit notes par mesure et contrastant avec la partie supérieure qui n’en fait entendre que deux ou trois. Il y a bien quelques modulations un peu dures et trop serrées les unes contre les autres, mais l’orchestre les impose avec une telle vigueur, une telle autorité, que l’oreille les accepte de prime abord sans résistance. En somme, il faut reconnaître là une page magistrale, instrumentée, comme tout le reste, par une main habile. Les instruments à vent et les voix y sont animés par un souffle puissant, et les violons, écrits avec une admirable aisance dans le haut de leur échelle, semblent lancer sur l’ensemble d’éblouissantes étincelles.

L’ouverture de Tannhauser est en Allemagne le plus populaire des morceaux d’orchestre de Wagner. La force et la grandeur y dominent encore ; mais il résulte, pour moi du moins, du parti pris de l’auteur dans cette composition, une fatigue extrême. Elle débute par un andante maestoso, sorte de choral d’un beau caractère, qui plus tard, vers la fin de l’allegro, reparaît accompagné dans le haut par un trait obstiné de violons. Le thème de cet allegro, composé de deux mesures seulement, est en soi peu intéressant. Les développements auxquels il sert ensuite de prétexte sont, comme dans l’ouverture du Vaisseau-Fantôme, hérissés de successions chromatiques, de modulations et d’harmonies d’une extrême dureté. Quand enfin le choral reparaît, ce thème étant lent et d’une dimension considérable, le trait de violons qui doit l’accompagner jusqu’au bout se répète nécessairement avec une persistance terrible pour l’auditeur. Il a déjà été entendu vingt-quatre fois dans l’andante ; on l’entend dans la péroraison de l’allegro cent dix-huit fois. Ce dessin obstiné, ou plutôt acharné, figure donc en somme cent quarante-deux fois dans l’ouverture. N’est-ce pas trop ? il reparaît encore souvent dans le cours de l’opéra ; ce qui me ferait