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Page:Berlioz - À travers chants, 1862.djvu/314

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À TRAVERS CHANTS

Si tel est le code musical de l’école de l’avenir, nous sommes de cette école, nous lui appartenons corps et âme, avec la conviction la plus profonde et les plus chaleureuses sympathies.

Mais tout le monde en est ; chacun aujourd’hui professe plus ou moins ouvertement cette doctrine, en tout ou en partie. Y a-t-il un grand maître qui n’écrive ce qu’il veut ? Qui donc croit à l’infaillibilité des règles scolastiques, sinon quelques bonshommes timides qu’épouvanterait l’ombre de leur nez, s’ils en avaient un ?…

Je vais plus loin : il en est ainsi depuis longtemps. Gluck lui-même fut en ce sens de l’école de l’avenir ; il dit dans sa fameuse préface d’Alceste : « Il n’est aucune règle que je n’aie cru devoir sacrifier de bonne grâce en faveur de l’effet. »

Et Beethoven, que fut-il, sinon de tous les musiciens connus le plus hardi, le plus indépendant, le plus impatient de tout frein ? Longtemps même avant Beethoven, Gluck avait admis l’emploi des pédales supérieures (notes tenues à l’aigu) qui n’entrent pas dans l’harmonie et produisent de doubles et triples dissonances. Il a su tirer des effets sublimes de cette hardiesse, dans l’introduction de la scène des enfers d’Orphée, dans un chœur d’Iphigénie en Aulide, et surtout dans ce passage de l’air immortel d’Iphigénie en Tauride


Mêlez vos cris plaintifs à mes gémissements.


M. Auber en a fait autant dans la tarentelle de la Muette. Quelles libertés Gluck n’a-t-il pas prises aussi avec le rhythme ? Mendelsohn, qui passe pourtant dans l’école de l’avenir pour un classique, ne s’est-il pas moqué de l’unité tonale dans sa belle ouverture d’Athalie, qui commence en fa et finit en majeur, tout comme Gluck, qui commence un chœur d’Iphigénie en Tauride en mi mineur pour le finir en la mineur ?

Donc nous sommes tous, sous ce rapport, de l’école de l’avenir.

Mais si elle vient nous dire :