Aller au contenu

Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et finit aux îles Lipari. Chambéry est en Savoie, la Savoie fait partie du royaume de Sardaigne, la Sardaigne est en Italie, les Savoyards sont pourtant très-peu Italiens. Or s’il y a réellement de vastes et magnifiques bois d’orangers dans l’île de Sardaigne, s’il s’en trouve même un assez joli dans un enclos de Nice, sur la rive droite du Payon, il ne faut pas s’attendre à rencontrer le jardin des Hespérides à Suze ni à Saint-Jean de Maurienne.

N’importe ! il y a peut-être aujourd’hui des bois d’orangers sur la route de Castellamare ; car quand ces bois-là se mettent à pousser quelque part, ils poussent vite ; il ne s’agit que de commencer.

En tout cas, il n’y a pas, à coup sûr, de bois de citronniers. Il serait impie de le croire.

— Pourquoi cela ?

— Pourquoi ? Vous n’avez donc jamais lu la fable le Gland et la Citrouille ? Vous ignorez donc que les citrons, au lieu d’être ronds comme les oranges, sont armés d’une protubérance fort dure, qui pourrait, si le fruit tombait sur la figure d’un voyageur endormi au pied du citronnier, lui crever un œil. La Providence sait ce qu’elle fait. L’auteur de l’apologue que je viens de citer le démontre clairement : Si Dieu a suspendu aux branches du chêne, dit-il, un fruit léger, quand la citrouille monstrueuse, plus convenable en apparence à un arbre puissant, repose à terre entre les feuilles d’une misérable herbe rampante, c’est afin de préserver les gens tentés de s’endormir au pied du chêne, d’avoir le nez écrasé par la chute de la citrouille.