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Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/89

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lait exécuter rem severam, m’apercevant : « Que faites-vous donc là ? me dit-il.

— Je marchande un billet, n’ayant jamais entendu le chef-d’œuvre annoncé pour aujourd’hui.

— Et quelle nécessité y a-t-il pour vous de l’entendre ?

— Il y en a plus d’une : les convenances… le désir d’expérimenter…

— Hé, quoi ! ne vous ai-je pas vu il y a quinze jours dans notre salle assister, du commencement à la fin, à l’exécution de notre jeune chef-d’œuvre ?

— Oui ; eh bien ?

— Eh bien, vous pouvez, par comparaison, apprécier le chef-d’œuvre ancien que nous allons chanter. C’est absolument la même chose ; seulement le chef-d’œuvre ancien est une fois plus long que le moderne et sept fois plus ennuyeux.

— Sept fois ?

— Au moins.

— Cela me suffit. »

Et je remis ma bourse dans ma poche et m’éloignai fort édifié.

Voilà pourquoi les sévérités de l’art musical m’inspirent par occasion une crainte si vive. Mais ma terreur était panique cette fois, très-panique ; et rien que la lettre de mon confrère ne devait la justifier. Le Calfat est un petit opéra tout à fait bon enfant, qui chante de bonnes grandes valses bien joviales, de bons petits airs bien dégourdis, éveillés, égrillards, et pour rien