Page:Bernanos - Scandale de la vérité.djvu/30

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moins qu’à nous élever je ne dis pas jusqu’à la conception, mais au souci, mais à la passion d’un salut éternel, du salut éternel de ce peuple, nous n’atteignons pas à moins qu’à vivre dans une angoisse mortelle, éternelle, dans une anxiété constante du salut éternel de notre peuple, du salut éternel de notre race[1]. »

« Le salut éternel de ce peuple », il y a de quoi faire rigoler M. Bailby et ses enfants de chœur, je ne trouve pas moins comique d’écrire à leur propos le mot de Raison d’État. La Raison d’État incarnée par M. Doriot, ou M. Sabiani, ou M. Jean Renaud, avouez qu’il y a de quoi rigoler. Ces gâcheurs et ces gâcheuses tutoient Louis XIV. Ils diraient volontiers avec l’accent du faubourg : l’État, c’est nous ! Mais Louis XIV disait aussi : mon peuple, et si dénués de vergogne que soient ces Messieurs, ils n’oseraient tout de même pas prendre une telle parole à leur compte. Le grand Roi disait « mon Peuple », comme il eût dit : « Ma conscience », et le peuple était en effet sa conscience. Car il répondait de

  1. Ch. Péguy. Notre Jeunesse.