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Page:Bernanos - Scandale de la vérité.djvu/38

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d’une sorte de terreur sacrée. Sur tout ce qui touche à ses préjugés ou ses rancunes, je tiens évidemment sa parole pour moins que rien, mais je crois sincères les contradictions qui l’animent. Il admire la France, la Monarchie, l’Église avec une lucidité déchirante, une jalousie féroce, sans espoir d’aller jamais au-delà d’une convoitise désespérée, comme l’impuissant une maîtresse, qu’il ne souhaite même plus d’étreindre. Les hideux blasphèmes du Chemin de Paradis qu’il a bien pu effacer de son livre, mais qu’il s’est toujours gardé, avec une honorable franchise, de rétracter, ne me scandalisent nullement. J’y vois plutôt le cri de rage d’un cœur qui ne peut se rendre. Évidemment les desseins de Dieu sur une telle âme ne nous sont point connus, sans doute ne dépend-elle plus que des violences soudaines, irrésistibles de l’inexorable Amour. Il n’en reste pas moins que le destin temporel d’un homme si cruellement divisé contre lui-même, passionné pour des vérités aux disciplines desquelles il s’acharne à plier sa pensée, alors que son être les refuse, en refuse la substance éternelle, la réalité profonde, — ressemble à l’une