Aller au contenu

Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/153

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de velours clair : elle y court, interroge hâtivement la jolie chevelure, redresse une mèche qui désertait à l’oreille gauche, lisse du bout des doigts les ondes brunes où des tons dorés s’allument. Comme elle a pâli, blême comme un jour de pluie ! Les yeux creusent, bleuis par le cerne. Elle est presque laide, songe-t-elle avec amertume. Ce dégoût d’elle-même ne dure pas. Puisqu’il a eu la générosité de venir, le fils du patron comprendra pourquoi elle est défaite : la souffrance n’est-elle pas une excuse ? Est-ce elle qu’il est venu voir, d’ailleurs ? Eh quoi ! toujours cette coquetterie sournoise dont elle ne peut faire taire la voix qu’après l’avoir laissé jaser en elle-même ? À la première impulsion de honte en succède une qui pardonne : elle devine qu’elle cède à une loi inéluctable de son être, qu’elle ne peut faire autrement. Le jeune médecin ne la regardera même pas : il vient retirer son père des griffes de la mort. Il apporte avec lui l’aide, une lumière qui est un sourire de vie. Lucile espère en sa force, en sa bonté. Elle exulte d’un bonheur pur : son père est sauvé ! Sa mère… au fait, il n’est pas décent qu’elle dorme… Pauvre mère ! elle en avait tant besoin !…

Elle va rompre le sommeil heurté de Germaine, lorsqu’elle entend la petite sœur indiquer le tournant du couloir :