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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

— Je ne m’étonne plus que vous y soyiez heureuse, dit-il, avec un sourire.

— Il est facile d’être heureuse.

— Avec votre cœur, oui, c’est plutôt facile…

— Ce n’est pas bien clair, ce que vous dites là !

— N’est-il pas courageux, votre cœur ? La vaillance rend le bonheur moins difficile.

— Qu’est-ce que vous en savez, de mon cœur ? Allons ! parlez-moi de mon cœur… il est… il est ?

Une joie mélodieuse chanta de sa gorge. Jean l’écouta rire, un ravissement extrême au fond de lui-même, il aimait le timbre à la fois souple et lent de sa voix, mais quelque chose de plus chaleureux, de plus suave y venait de bruire, il s’abandonne à tout le charme que Lucile, à chaque instant, lui révèle et se flétrit d’injustice envers elle, de l’avoir méconnue, ignorée, presque dédaignée.

— Il est… eh bien… il est, balbutia-t-il.

— Vous en savez moins long que vous ne le prétendiez !

— Eh bien, eh bien, je le connais, je l’ai vu battre, je l’admire ! Il est un cœur loyal d’ouvrière canadienne-française !

Elle ne badine plus : le ton convaincu du jeune homme le lui défend, l’a émue comme d’un mystère. Elle sent un orgueil d’elle-même la remplir, suivi d’une gratitude ineffable. Elle est certaine