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Page:Bessette - Le débutant, 1914.djvu/129

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le débutant

plus tôt qu’il ne l’espérait.

Les descendants de ces terribles guerriers, qui ne vivaient que de massacres aux temps glorieux de la Nouvelle-France, s’étaient parés de leurs ornements barbares en l’honneur des visages pâles venus des grands wigwams de la métropole pour les admirer comme des bêtes curieuses. Seul, dans l’œil morne de l’iroquois vaincu, dompté, décimé après plus de deux siècles de servitude, un éclair furtif provoqué par l’envahissement de sa bourgade, rappelait la farouche vaillance du scalpeur de chevelures. Ces sauvages, convertis au catholicisme, subissaient d’ailleurs l’influence de leurs prêtres, qui les entretenaient sans cesse du grand Manitou et de la sainte iroquoise Teckawita[1], dont le nom signifie : celle qui s’avance en tâtonnant. Monsieur le curé, accompagné de son vicaire, vint au devant des distingués visiteurs et les conduisit à l’église où un chœur d’iroquoises chanta un cantique édifiant. Jacques Vaillant compara ce chant au miaulement des chattes, par les belles nuits d’été. Cette modeste église, dominant le fleuve Saint-Laurent, possédait de précieuses reliques, au dire du notaire Pardevant, le vénéré président de la Société des Chercheurs : un autel donné par le roi de France, Louis XIV, et une cloche, cadeau du roi d’Angleterre, George III. Après la messe, on se rendit sur la place du village où l’on assista aux danses des guerriers déterrant la hache de guerre. Tous ces grands corps, recouverts de peaux de bêtes, barbouillés de rouge et de noir, empanachés de plumes, sautèrent et gesticulèrent durant une heure, sous le commandement du chef de la tribu, qui portait le joli nom de Koncharonkanématchega.

C’est à ce moment que l’incident, auquel Jacques Vaillant devait être redevable de la conquête du cœur

  1. https://fr.wikisource.org/wiki/Catherine_Tekakwitha
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