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Page:Bessette - Le débutant, 1914.djvu/79

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le débutant

Le numéro sensationnel annoncé, fut plus sensationnel qu’on ne l’avait, prévu.

Tout à coup la danseuse se redresse, échappe aux bras des favorites, s’élance comme pour fuir la caresse du maître, puis, revenant peu à peu vers lui, comme prise d’un invincible désir, mime la possession avec une telle ardeur que, dans la salle, les spectateurs affolés, trépignent et se hissent sur leurs fauteuils. Mais voilà que les pendeloques, trop consciencieusement secouées, entraînent la ceinture qui se détache. Ce fut une vision rapide, car, aussitôt les lumières, brusquement, s’éteignirent. Quelqu’un cria : Police ! Sauve qui peut général ; tout le monde se rua vers la sortie. Jacques et son compagnon, s’appuyant l’un sur l’autre, tentèrent de se frayer un passage, mais ils furent bousculés et repoussés vers la loge où ils avaient admiré, avant le spectacle, une main de femme, finement gantée. À ce moment, le théâtre s’éclaira de nouveau et une voix exquisement féminine, une voix tremblante d’émotion, fit retourner l’ami de Mirot :

— Oh ! Jacques, je vous en prie, ne m’abandonnez pas, venez à mon secours !

À cet appel, le jeune homme montant sur un fauteuil pour sauter dans la loge, dit à son compagnon :

— Ne m’attends pas. À demain !

Le calme était maintenant rétabli. La salle achevait de se vider. Paul Mirot sortit le dernier. Sur le trottoir, il aperçut son ami accompagnant une dame voilée, enveloppée dans un long manteau sombre. Ils se perdirent dans la foule et Paul se dirigea vers la rue Dorchester, pour regagner son domicile, se demandant qui pouvait bien être cette dame s’aventurant seule dans un endroit aussi compromettant.

Le lendemain, au journal, La Pucelle fulmina con-

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