Aller au contenu

Page:Bibaud - Histoire du Canada et des Canadiens sous la domination anglaise, Vol 2, 1844.djvu/286

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

résolutions, ou signer des requêtes. Au temps dont nous parlons, les habitans des campagnes ne voyaient qu’un côté de la question, n’entendaient qu’une des parties dans la cause. Le journalisme en langue française était, pour ainsi dire, en une même main, mue par le même mécanisme, dirigée vers le même but. Il y avait unanimité chez les rédacteurs de la Gazette de Québec, du Spectateur Canadien et de la Minerve. C’était à la lecture de ces seuls journaux que devait se borner la population canadienne[1]. Si l’on y transcrivait des propositions évidemment vraies, c’était pour, au moyen de commentaires amphigouriques, les faire regarder comme fausses, ou inapplicables au Canada ; si quelques écrits lumineux, ou pour mieux dire, raisonnables, paraissaient quelque part, comme à la dérobée, on s’efforçait aussitôt d’en accabler les auteurs sous le poids des grands mots vides de sens, des phrases inintelligibles, des exclamations ridicules, des épithètes injurieuses ; on croyait avoir convaincu d’erreur son adversaire, avoir remporté sur lui une victoire éclatante, quand on lui avait exagéré les droits, les libertés d’un sujet anglais[2], presque aussi ridiculement qu’un grand-juge d’Angleterre ou d’Écosse en exagéra autrefois la noblesse[3].

  1. The Editor of the Spectateur Canadien (M. Bibaud) is not only a learned and able man, but a good natured and complaisant man also — else he would not have received C. D’E., under existing circumstances : C. D’E. is an employé, ” &c. — Canadian Spectator du 13 décembre 1826.
  2. De là put venir que quelques uns crurent qu’il leur était permis de prendre cavalièrement les plus grandes libertés, même avec le gouverneur en chef.
  3. A British subject is the noblest being on earth. Ce qui fit dire à un de nos écrivains, qu’un crocheteur, un décrotteur, un ramonneur anglais, devait conséquemment avoir le pas sur un prince français, un archiduc d’Autriche et un grand-duc de Russie, et même sur « mieux que ça ».