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Page:Bibaud - Histoire du Canada et des Canadiens sous la domination anglaise, Vol 3, 1878.djvu/108

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de despotisme pour se mettre à l’abri de votre liberté. » C’est s’exprimer un peu fortement, et, sans doute, passer les bornes de la modération et du sang-froid, mais il n’en est pas moins vrai que, quand règne l’intimidation, la coercition morale, et l’esprit de parti jusqu’à l’aveuglement, il n’y a plus de liberté pour personne, peut-être point pour les acteurs eux-mêmes[1], et tout cela régna, à un degré incroyable, pendant et après cette malheureuse élection. Mais, pire que tout cela, fût la tentative de démoraliser le peuple, de désorganiser la société, un incendiarisme jusqu’alors inconnu au pays. « Un volume suffirait à peine pour répéter en détail, les faussetés, les mensonges, les calomnies propagés chez la classe crédule ou peu instruite de nos compatriotes, au moyen de la seule gazette publiée en langue française », ” (à Montréal[2]). Le numéro de la Minerve du 24 mai surpasse peut-être tout ce qui a jamais été écrit de plus inflammatoire, de plus atroce, pour ne pas dire, de plus sanguinaire[3].

  1. « Ceux qui se sont une fois engagés dans cette voie sont entrainés plus loin qu’ils ne voudraient, et qu’ils n’avaient crû, en se plaçant ainsi dans une situation violente, dont il leur tarde à eux-mêmes de sortir. » — L’opposition dans le gouvernement, et la licence de la presse.
  2. Quelques réflexions sur la dernière élection du Quartier-Ouest, &c.
  3. « Il est difficile de n’être pas convaincu qu’on avait le désir de faire un massacre général. Il est clairement prouvé que la faction ennemie des Canadiens se préparait à cette atrocité depuis longtems… Il y a 30 ans, le parti que nous combattons aujourd’hui voulait déjà nous fusiller… On aurait voulu aussi faire tuer M. Tracey. Les balles l’ont respecté, ainsi que ses amis, quoiqu’on les eût désignés du doigt pour les faire massacrer… Les meurtriers ouvrirent les yeux, ou plutôt leur rage se trouva assouvie. Des partisans de M. Bagg s’approchèrent des cadavres en riant, et regardèrent avec une joie féroce le sang canadien qui ruisselait dans la rue. On les a vus se donner la main, se féliciter, et regretter que le nombre des morts ne fût pas plus grand… N’oublions jamais le massacre de nos frères… Que les noms des pervers, qui ont tramé, conseillé, exécuté cet attentat soient inscrits dans nos annales, voués à l’infamie et à l’exécration… »