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Page:Bibaud - Les fiancés de St-Eustache, 1910.djvu/159

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LES FIANCÉS DE ST-EUSTACHE

armes aux Anglais, tous furent exterminés. Ici aujourd’hui, comme alors, en ce pays, on veut notre avilissement, notre perte, on veut faire disparaître au Canada l’élément français ; que deviendrions-nous si nous imitions la soumission des Acadiens ? Non, non, il faut vaincre ou mourir ; mais non d’une mort vile, il faut mourir en braves les armes à la main.

La jeune femme avec angoisse se pressa sur le cœur de son mari.

— Ne dis pas cela, Olivier, ne le dis pas, fit-elle avec un sanglot.

L’enlaçant de ses deux bras le docteur la couvrit de baisers.

— Je t’aime, je t’aime, murmura-t-il, et des larmes brûlantes coulèrent lentement sur ses joues.

Elle avait caché sa tête dans son sein et leurs sanglots se mêlaient. L’ombre de la nuit était descendue dans la chambre : ils étaient environnés de ténèbres et leurs âmes saisies de lugubres pressentiments ; c’était un adieu suprême qu’ils échangeaient, ils le sentaient et dans férus tendres épanchements, ils se disaient :

— Pourquoi, pourquoi mourir, puisque nous nous aimons, puisque la vie serait si belle, alors que notre tendresse la dore.

Mourir à trente ans lorsqu’on est chéri d’une compagne aimée, lorsqu’on a reçu d’elle un en-