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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/129

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

Les hommes du rancho sont deux Gallois, Evans et Edwards, tous deux mariés et ayant des enfants. Ils se ressemblent aussi peu que possible. Griff, comme l’on appelle Evans, est petit et court, hospitalier, insouciant, joyeux, sociable et vif. Il n’est l’ennemi de personne, que de lui-même. Il a eu l’esprit et le goût de découvrir Estes-Park, où, à leur tour, des gens l’ont découvert et l’ont décidé à les nourrir, à les loger et à ajouter des cabines à la sienne. C’est un tireur hors ligne, un chasseur heureux et habile, un hardi montagnard, un bon cavalier, un excellent cuisinier et généralement un bon vivant. De grand matin, son rire joyeux retentissant dans la cabine devient contagieux, et lorsque, le soir, les poutres résonnent du bruit de chansons telles que : Connaissez-vous John Peel, Le temps jadis et John Brown, que seraient les chœurs sans la voix du pauvre Griff ? Sans lui, que serait Estes-Park ? Dernièrement, lorsqu’il est allé à Denver, il nous a manqué tout autant que l’aurait fait le soleil, et peut-être davantage. Aux premières heures matinales, alors que le pic de Long est rouge et que le givre fait craquer l’herbe, il me réveille en frappant gaiement à ma porte : « Venez-vous chasser le bétail avec nous ? » Ou bien : « Voulez-vous nous aider à ramener le bétail ? Vous choisirez votre cheval. J’ai besoin de quelqu’un. » Brave, prodigue, populaire, le pauvre Griff aime trop les liqueurs pour que ses affaires prospèrent ; il est toujours accablé de dettes. Il gagne un argent fou, mais le place dans un sac percé. Il a cinquante chevaux et mille têtes de bétail, dont la plupart lui appartiennent et passent l’hiver ici. Sa femme est très-laborieuse ;