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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/151

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

le fait retourner. Ce qu’il y a de plus stimulant, c’est lorsqu’une bête s’échappe et court furieusement du haut en bas d’une colline et qu’on la suit partout, par-dessus et parmi les rochers et les arbres, doublant quand elle double et lui tenant tête jusqu’à ce qu’on l’ait ramenée. Les taureaux étaient très-faciles à conduire, mais les vaches avec des veaux, vieilles ou jeunes, étaient fort ennuyeuses. Je me trouvai par hasard entre l’une d’elles et son veau, dans un passage étroit ; elle s’élança sur moi en baissant ses grandes cornes sous mon cheval, mais il se cabra et tourna adroitement de côté. Cela arrivait constamment. Une belle vache rouge devint tout à fait furieuse. Elle avait un veau presque aussi grand qu’elle, dont les cornes étaient très-développées et qui était bien capable de se tirer d’affaire tout seul, mais elle voulait le protéger contre toutes sortes de dangers imaginaires. L’un des chiens, qui était jeune, voyant qu’elle était excitée, prenait plaisir à aboyer après elle, et à la fin elle était tout à fait en furie. Elle se retourna quarante fois au moins pour nous tenir tête, creusant la terre avec ses cornes, jetant en l’air les grands chiens de chasse et tuant deux veaux ; elle devint en fin si dangereuse pour le troupeau, qu’au moment où la chasse finissait, Evans prit son revolver et la tua. Son veau, pour lequel elle avait si aveuglément combattu, la pleura tristement. À différentes reprises, elle s’était élancée sur moi, folle de rage, mais les chevaux habitués au bétail restent parfaitement calmes, et, presque sans volonté de ma part, le mien sautait de côté au bon moment et déroutait l’assaillant. À la tombée de la nuit, nous avons