Aller au contenu

Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/462

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en quatre colonnes, elle devait exécuter une marche de flanc, en tournant autour de Modlin comme autour d’un pivot, et là colonne le plus l’approchée de Modlin avait ordre de s’avancer avec lenteur pour que celle qui se trouvait à l’extrémité du rayon eut le temps d’accomplir son mouvement. Cette marche était au plus haut point dangereuse et téméraire. Les soldats avaient à parcourir un terrain défoncé par les pluies, coupé de rivières et de torrents. Fatiguées par des chemins difficiles embarrassées de leurs équipages, de leurs nombreuses pièces de canon, et de l’immense attirail que suppose un approvisionnement pour vingt jours, poursuivies en outre par le choléra qui jonchait la route de malades et de mourants, les divisions se traînaient péniblement, haletantes, rompues, dispersées. Qu’une armée de quarante mille hommes, débouchant de Modlin se fût abattue sur ces masses en désordre, c’en était fait peut-être de Paskéwitch, et la Pologne était sauvée. Un corps de Polonais, envoyé en reconnaissance, prouva combien ce résultat était probable, par la confusion qu’il jeta dans l’armée russe, en culbutant les cosaques d’Ataman.

Mais, tranquille sur la rive gauche, Skrzynecki s’occupait à faire dire des messes dans son camp. La bataille ! la bataille ! criaient les soldats avec transport, toutes les fois que le généralissime passait devant le front des troupes ; lui, opiniâtre, inflexible, il souriait ou haussait les épaules. Quel mystère cachait cette conduite ? Le héros de Dobre, de Grochow, de Wawer et de Dembewilk le voulait-il