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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/482

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au hasard par l’épée des sergents de ville. Pendant ce temps, une voiture, vivement poursuivie traversait avec vitesse la place Vendôme. Cette voiture s’arrêta tout à coup, et deux hommes en descendirent. C’étaient MM. Sébastiani et Casimir Périer. On les avait reconnus, au sortir de l’hôtel des affaires étrangères, et le peuple était très-animé contre eux : la fermeté de leur contenance le désarma. Ainsi croissaient les colères, les périls, les alarmes ; et cette explosion du sentiment public, même en ce qu’elle avait d’exagéré et de juvénile, accusait l’insuffisance de ces ministres à petites vues, qui se font passer pour des hommes pratiques, en négligeant dans leurs calculs tout le côté sympathique de la nature humaine ; esprits étroits, incapables de comprendre que dans les élans du cœur se trouve le plus puissant levier de la politique.

Aussi accueillait-on avec empressement tous les écrits provocateurs qu’on répandait à profusion. La douleur était devenue révolte, et l’on récitait partout, avec l’enthousiasme de l’indignation, ce dithyrambe de la Némésis, feuille hebdomadaire, écrite en vers :


Noble sœur ! Varsovie ! elle est morte pour nous,
Morte un fusil en main, sans fléchir les genoux,
Morte en nous maudissant à son heure dernière,
Morte en baignant de pleurs l’aigle de sa bannière,
Sans avoir entendu notre cri de pitié,
Sans un mot de la France, un adieu d’amitié !
Cachons-nous, cachons-nous nous sommes des infâmes ;
Que tardons-nous Prenons la quenouille des femmes ;
Jetons bas nos fusils, nos guerriers oripeaux,