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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/379

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Seulement, ils venaient de révéler dans M. Thiers des aptitudes toutes nouvelles. Ses amis s’empressèrent d’enfler son succès ; et M. de Rigny, que de tels éloges humiliaient, en conçut un dépit qu’aigrissait en lui le sentiment de son insuffisance.

Les passions de parti et les circonstances semblaient donc concourir à poser la candidature du duc de Broglie. Mais elle était repoussée par le roi et par M. Thiers. Le roi ne pouvait supporter l’idée de trouver sans cesse en face de lui un personnage sans souplesse. M. Thiers craignait la force que M. de Broglie allait apportera M. Guizot dans le Conseil ; il craignait qu’à côté de ces deux hommes sa part d’influence ne devint trop petite. il fallut essayer de diverses combinaisons. Des démarches furent faites auprès de M. Mole, qui ne se crut pas en état d’affronter les rancunes qu’éveillerait son avénement. Des pourparlers eurent lieu, qui avaient pour but de faire accepter un portefeuille à M. de Montalivet, dont le roi prisait le dévoûment, d’une façon toute particulière ; mais M. de Montalivet tremblait d’avoir à prendre place dans un Cabinet qui, n’ayant pas pour membres MM. Thiers et Guizot, risquait de les avoir pour adversaires.

Au milieu de toutes ces tentatives, M. Thiers montrait le plus parfait détachement du pouvoir. Accepter le duc de Broglie pour collègue lui paraissait un inconvénient, un péril ; il s’y refusait. Mais il offrait de se retirer, et il l’offrait avec une bonne grâce, avec des dehors d’insouciance, dont la sincérité était suspecte au roi. Les choses traînaient en longueur. Le 20 février, le maréchal Mortier avait