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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/420

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prison du Luxembourg que les prévenus qu’il espérait gagner. Pour ces derniers, le régime de la prison fut adouci autant que possible ; pour eux le visage des géoliers devint moins farouche, et une nourriture plus saine leur fut mesurée d’une main plus libérale. Et en même temps, on traitait les malheureux hôtes de Sainte-Pélagie, de la Conciergerie et de l’Abbaye, avec une rigueur calculée. Quiconque laissait percer de l’indécision ou de la fatigue devenait sur-le-champ, de la part des agents du pouvoir, l’objet d’égards empressés et de délicates prévenances. On mit en jeu tour-à-tour les excitations de la misère, de la vanité, de la douleur. L’abbé Noir, accusé lyonnais, ayant perdu sa mère, on vint le trouver au milieu de ses larmes, pour arracher à son affliction un consentement qu’il avait toujours refusé, et que, même alors, on ne put obtenir de lui. Des prisonniers sur qui le pouvoir comptait, quelques-uns, quoiqu’en très-petit nombre, appartenaient à la lie de la société, ne se piquaient en aucune sorte d’être républicains, avaient beaucoup moins de vertus que de vices, et ne s’étaient jetés sur la place publique que par esprit de désordre. Ceux-là, pourtant, le pouvoir les glorifia ; et les meilleurs, il les appelait des misérables !

De leur côté, les républicains n’épargnaient rien pour encourager à la constance ceux des prisonniers qui, n’étant pas hommes de parti, menaçaient de faiblir. Dans des articles qu’on eût dit burinés avec la pointe d’une épée, Armand Carrel célébrait le courage des accusés et leur dévoûment ; on expo-