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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/489

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Les lois de septembre rétablissaient aussi la censure, cette censure contre laquelle les libéraux, aujourd’hui vainqueurs, avaient si énergiquement élevé la voix, du temps de la Restauration. Qu’on eût essayé d’imprimer aux théâtres une direction sociale, rien de mieux, suivant nous. De tous les moyens de gouvernement, il n’en est pas de plus efficace et de plus légitime que le théâtre. Permettre à un simple particulier d’agir, au gré de son caprice, sur les hommes rassemblés, par les séductions de la scène, l’intérêt du drame, la beauté des femmes, le talent des artistes, l’enchantement des peintures et des flots de lumières, c’est livrer au premier corrupteur venu l’âme du peuple en pâture c’est abandonner au passant le droit d’empoisonner les sources de l’intelligence humaine. Dans un pays où le gouvernement serait digne de ce nom, l’État ne saurait renoncer à la direction morale de la société par le théâtre, sans abdiquer. Mais si les ministres du 11 octobre s’étaient proposé pour but la réalisation d’une aussi noble pensée, au lieu de revenir à ce que la censure avait eu de plus tyrannique et de plus inepte, ils auraient demandé qu’on retirât aux spéculateurs, pour la confier à l’Etat, l’exploitation des théâtres et ils en auraient attribué la surveillance à un jury véritablement national, c’est-à-dire électif, temporaire amovible par le peuple et responsable. C’est le contraire qu’ils firent, dominés qu’ils étaient par des passions mesquines et des idées sans profondeur.

Ainsi, les droits de la raison et ceux de la presse étaient foulés aux pieds de la manière la plus brutale : par M. Thiers, que la presse avait poussé au