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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/206

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respect dû à la justice. Bientôt la lecture du verdict d’acquittement par le greffier ouvrant un libre cours aux sentiments de tous, les accusés se précipitent dans les bras de leurs défenseurs on s’empresse autour d’eux, on les félicite ; et ce cri résonne avec force dans la salle : Vive le jury ! le jury d’Alsace ! Dans la cour extérieure du palais, mêmes transports. La ville de Strasbourg prit un air de fête, on offrit aux accusés un banquet somptueux, et les émotions furent prolongées par un duel entre le colonel Tallandier et le commandant Parquin, duel où celui-ci reçut une assez grave blessure, après avoir mis lui-même son adversaire en danger.

L’issue du procès de Strasbourg consterna les ministres. Le roi en fut particulièrement affecté. À Vendôme le sous-officier Bruyant venait de tenter une insurrection avec le drapeau de la république ; la pensée des complots grandissait ; des haines implacables germaient dans la nuit dont s’étaient environnées les sociétés secrètes ; un ouvrier mécanicien nommé Champion fut découvert tramant un régicide, et il s’étrangla dans son cachot, sans qu’on pût savoir s’il ne laissait pas quelque sanglant héritier. Tout cela pesait sur le cœur de Louis-Philippe. Accoutumé, lorsqu’il n’était qu’un prince du sang, au bonheur des promenades solitaires, il gémissait sur sa liberté perdue et il s’irritait de cette prudence pleine d’angoisse dont il avait dû s’armer contre les desseins de tant d’ennemis invisibles. Qu’il se mêlât à une semblable tristesse des élans d’indignation et le désir de couper court à toute tentative nouvelle par des mesures de rigueur, rien