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Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/520

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des pays intéressés à ce que leur repos ne soit pas compromis, ou selon l’organisation intérieure de ceux où le droit d’asile est en honneur. Ainsi, par exemple il est évident que l’Angleterre, isolée du continent par sa position insulaire, peut donner, sans danger pour les autres États, une plus large extension à ce droit ; et qu’un pays constitué comme la France, avec sa puissante organisation administrative, sa force militaire et les moyens de police dont elle dispose, peut offrir, sous le même rapport, des garanties également rassurantes ; tandis que ces garanties n’existent pas habituellement pour la Suisse, non que ses intentions puissent être mises en doute, mais parce que sa constitution fédérative, son fractionnement en vingt-deux États souverains, régis par des législations différentes et par des principes divers d’administration, ne sauraient permettre qu’elle ait au même degré les moyens de surveillance et de répression contre les réfugiés qui, accueillis sur son territoire, oseraient abuser du bienfait de l’hospitalité au détriment des États avec lesquels la Confédération helvétique est en paix.

Ainsi donc, dans les mesures adoptées par la sagesse du Directoire, et dont le gouvernement du roi consent à faciliter, autant qu’il dépendra de lui, l’exécution, il ne s’agit aucunement de porter atteinte au droit d’asile, mais d’en rendre l’exercice compatible avec le droit international, avec le repos des pays voisins de la Suisse, avec l’honneur et les intérêts de la Confédération tout entière.

Ces vérités incontestables trouveraient, s’il le fallait, une démonstration encore plus éclatante dans les enseignements du passé et dans l’autorité d’exemples récents, ou, pour mieux dire, dans le témoignage de faits actuels. Il suffirait à cet égard de rappeler l’expédition tentée en 1834 contre la Savoie par les réfugies admis en Suisse ; la fâcheuse influence que cette entreprise, hautement condamnée par le Directoire, mais qu’il ne s’était pas trouvé en mesure de prévenir, exerça sur les relations extérieures de la Confédération les nombreuses et graves complications dont elle fut la source. Il suffirait également de rappeler les machinations bien plus récemment ourdies contre la tranquillité de certains États de l’Allemagne, machinations découvertes par un des gouvernements de la Suisse, officiellement dénoncées par le Directoire fédéral, et dont, par ce motif, la Suisse se doit à elle-même de ne pas tolérer les auteurs ou les complices sur son territoire. Le soussigné n’a parlé jusqu’à présent que de la Sardaigne et de l’Allemagne, dont ces attentats et ces complots menaçaient la sécurité. Mais la France elle-même n’est-elle pas éminemment intéressée dans cette importante question de droit international, lorsqu’il est avéré que les réfugiés en Suisse sont en rapport avec les anarchistes français, lorsque leurs indiscrétions attestent si évidemment la connaissance qu’ils ont des abominables projets des régicides, lorsqu’enfin il est démontré que leurs desseins se lient tout au moins d’intention et d’espérances aux crimes récemment tentés en France ? Il est clair qu’un pareil état de choses ne saurait plus se prolonger, tant pour la Suisse elle-même que pour les autres Puissances. Nul doute encore que si les étrangers, dont les trames révolutionnaires