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Page:Blanqui - Cours d’économie industrielle 1836-1837.djvu/332

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chez un horloger de la même ville appelé Kay, à qui il communiqua son projet et le résultat de ses réflexions. Celui-ci s’enthousiasma à son tour et les deux inventeurs se réunissaient tous les jours dans le grenier de Highs, dont la porte fut soigneusement fermée, pour confectionner les rouages et les autres pièces d’une machine, produit de leurs veilles. Cependant les voisins avaient percé le mystère de ces deux pauvres idéologues, et les quolibets leur pleuvaient de toutes parts. Plusieurs mois s’étaient déjà écoulés sans résultat apparent, lorsqu’un beau jour à la suite d’un accès de désespoir et de découragement, les rouages furent jetés par la fenêtre pour le plus grand amusement des railleurs. L’horloger Kay eut bientôt pris son parti ; quand on lui demandait combien son maître lui donnait pour fabriquer des machines à filer, il répondait qu’il avait renoncé à la filature et puis il mêlait ses railleries à celles de ses voisins. Highs, au contraire, fut bientôt revenu d’un premier moment de faiblesse ; il sentait en lui se développer le germe d’une pensée féconde et quand ses voisins lui demandaient ironiquement de la trame, chacune de leurs paroles était un nouvel aiguillon pour lui. Il reporta ses rouages brisés dans son grenier et après de nouveaux efforts, il parvint à faire marcher cette machine tant désirée, qui répondit si victorieusement, non-seulement à tous les demandeurs de trame de Leigh et du Lancashire, mais encore à ceux de toute l’Angleterre. Highs avait une fille, qui, elle aussi avait dû souffrir sa