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Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/75

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Les voici, ajouta Robert, en les plaçant sur le bureau.

— J’ai beaucoup de peine à croire que vous n’ayez eu qu’à les prendre dans un de vos tiroirs. Je sais fort bien que votre situation de fortune vous aurait permis de me rembourser plus tard. Mais cette fortune est en terres dont votre mère touche la moitié du revenu. Et je doute fort que vous ayez économisé dix mille francs sur les appointements que je vous donne. D’ailleurs, si comme vous le prétendez, vous aviez eu de l’argent chez vous, vous ne m’auriez pas écrit pour me demander congé jusqu’à demain. Vous vouliez vous donner le temps de vous procurer la somme. Vous l’avez trouvée plus vite que vous ne l’espériez, et vous voilà.

En parlant ainsi, le banquier regardait fixement Bécherel. Il aurait voulu lire sur le visage de son jeune secrétaire le repentir ou tout au moins la confusion qui précède un aveu. Mais au lieu de rougir, Bécherel relevait la tête. Son orgueil étouffait la voix de sa conscience et il répliqua d’un ton cassant :

— Je n’ai rien à me reprocher. Vous m’avez remis hier dix mille francs ; je vous les rapporte ce matin. Que demandez-vous de plus ?

— Alors, vous croyez que la restitution suffit pour effacer le souvenir d’un abus de confiance.

— Monsieur ! cria Robert en se levant furieux.

— Oui, monsieur, un abus de confiance, reprit M. Labitte. Je répète ce mot parce que je n’en connais pas d’autre pour qualifier la faute que vous avez commise. Et il faut que vous ayez sur l’honneur des notions bien fausses, si vous pensez qu’il est