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Page:Boissonnas, Une famille pendant la guerre, 1873.djvu/174

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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

regarder mon pauvre jeune maître qui faisait peine. M. André le reconnaît, il paraît que c’était un camarade, mais je ne peux pas écrire le nom à madame faute de savoir comment.

Toujours est-il qu’il appelle du monde, qu’on me descend M. André avec bien de la douceur, qu’on le couche, le change et le restaure que c’était un plaisir et qu’il me semblait déjà le voir se reprendre un peu.

Mais tout de suite, il nous est survenu de l’embrouille, parce que les jeunes messieurs voulaient garder M. André, et que lui se fâchait et criait : « Je veux m’en aller, je recommencerai d’ici huit jours, ainsi c’est pas le cas de me faire prendre. Vous voyez bien que l’ennemi sera ici dès demain, je ne veux pas qu’il m’y trouve. S’il le fallait, je repartirais bien maintenant. » Enfin M. André a fini de dire ses raisons, et les autres ont consenti.

Le même soir, par la forte nuit, nous avons repris notre collier de misères, ce n’est que juste de le dire, et avec bien du regret de ma part, nous avons souhaité le bonsoir à ces braves messieurs. M. André n’osait plus se plaindre de la route, puisqu’il l’avait voulu faire. Tout de même, nous avons arrêté au bout d’une heure et demie à une ferme nommée l’Épronnière, où je n’ai pu avoir qu’une laide paillasse avec grand’peine et beaucoup d’argent. Au grand matin, nous sommes repartis, et il s’est trouvé que M. André