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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/159

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demande, ajouta-t-elle, ce ſera quelqu’une de ces Nones… Son Confeſſeur peut-être qui l’aura exigé… Les plus triſtes cérémonies leur ſont familières… Elle ſe tut, rêva, parut quelquefois agitée… J’étois tremblante… Nous arrivâmes. Quel tableau ! pour deux femmes du monde, uniquement occupées de leurs plaiſirs & de leurs paſſions ! Des Religieuſes à genoux, récitoient des prieres qu’elles interrompoient par leurs ſanglots… Ma ſœur, dans l’âge des graces, & de la beauté, étoit étendue ſur un lit de douleur, mourante, & méconnoiſſable… Chaque reſpiration lui coûtoit un effort… Tous ſes traits étoient défigurés… Ses yeux fixes, conſervoient un feu ſombre, plus effrayant mille fois qu’une extinction totale… Nos noms, qu’on prononça très-haut, ſemblerent rappeller ſon ame prête a fuir, & répandre ſur ſon viſage je ne ſais quoi de menaçant. Approchez, Madame, dit-elle à ma mere, venez jouir de votre ouvrage, venez voir expirer votre victime : c’eſt pour vous procurer cette ſatisfaction, que j’ai deſiré votre préſence.

La Supérieure, épouvantée de ce début, l’interrompit par une pieuſe exhortation… Laiſſez-moi, dit-elle, en la repouſſant d’une main mal aſſurée ; je ſuis ſous l’empire de