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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/189

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pour arriver au même but : je jurai de prendre la plus courte, la plus ſûre, & je me ſuis tenu parole.

„ Trahie par mon amant ; rejettée par ma mere ; forcée de haïr, comme rivale, une ſœur dont j’avois cru me faire une amie, je ne reſpirois plus qu’un air empoiſonné ; je ne voyois rien qu’à travers les ſombres voiles du déſeſpoir. J’abhorrois également les hommes, les femmes, & moi-même. Que me reſtoit-il qui pût m’engager à reſpecter ma vie ? Quoi ? la vertu ? En comparant les notions qu’on m’en a données, à celles que j’ai reçues de la nature, je ne penſe pas l’avoir jamais bien connue. La raiſon ? Elle m’éclairoit, & m’éclaire toujours ſur mes maux, ſans m’en indiquer le remede. L’Etre ſuprême ? Graces aux coupables ſoins de Murville, ſes loix m’étoient devenues problématiques. Enfoncée dans cet abyme de privations, je tournai mes regards vers l’état religieux, que j’avois quelquefois enviſagé comme ma derniere reſſource. J’étois ſûre que chacune de ſes pratiques me fourniroit un ſupplice particulier, qu’elles allumeroient dans mon ſang un feu deſtructeur, dont ma mort ſeroit la fuite… Je ne me trompois pas.