Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 87 )

M. de Murville à Mademoiſelle d’Aulnai.

„ De grace, Mademoiſelle, ceſſons de nous perſécuter. Vos reproches ſont de la derniere injuſtice ; je ne pourrois y répondre que par des répétitions. Vous ſavez que mon mariage, avec votre ſœur, n’a été qu’une affaire de raiſon : pourquoi donc me l’imputez-vous à crime, comme ſi le choix entre vous deux, eût dépendu de ma volonté ? Que vous êtes ingénieuſe à vous forger des peines ! Quelle folie d’imaginer que je ſois devenu ſubitement amoureux d’elle, depuis qu’elle eſt à moi, comme ſi mon cœur avoit été ou très-vuide, ou très-neuf ! Quoi ! parce que je lui ai donné des fêtes ? que je lui ai fait des cadeaux ? que j’ai pour elle les égards que la décence exige ? Ne croyez donc pas qu’on ait beſoin d’amour pour toutes ces choſes… On ſe marie parce que cela arrange. On vit bien enſemble, parce qu’on eſt honnête, & qu’on reſpecte le public ; mais de l’amour ! qui eſt-ce qui en a pour ſa femme ? Après quelques mois, ce n’eſt plus qu’un être de raiſon, même au regard de ceux qui ſe ſont pris par goût : eh tant mieux ! la liberté en eſt moins gênée ; les amuſements plus variés…