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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/205

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bre, & j’y reſtai dans une véritable agonie…

„ La fatigue m’aſſoupit inſenſiblement, & je ne m’éveillai qu’aſſez avant dans la nuit… J’étois briſée… Le froid de la terre s’étoit inſinué dans tout mon corps… Un mal-aiſe univerſel me fit croire que je touchois à ma derniere heure : la joie que j’en conçus dura bien peu ! Je n’en étois pas à la fin de mes maux.

„ Depuis ce temps, ma miſérable vie s’eſt paſſée en des alternatives continuelles de tranſports & d’abattements, de traits de force & d’actes de foibleſſe… L’amour, la haine, la jalouſie, les regrets, m’ont déchirée ſucceſſivement, quelquefois tous enſemble. Le ſeul ſentiment que j’aie éprouvé, ſans interruption, c’eſt le dégoût de mon exiſtence, joint au deſir de m’en délivrer par les moyens les plus courts. Delà ce renoncement à tout, qu’on qualifioit vertu. Delà cette exactitude à des exercices abhorrés. Delà enfin, le ſilence que j’ai gardé ſur ces détails. Il m’auroit été trop doux de vous faire partager mes peines auſſi-tôt que je les ai reſſenties. Je craignois qu’une telle ſatisfaction ne m’éloignât de mon terme… Mais… je m’abuſe. Non, ce n’eſt point ce raffinement