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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/25

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currence ; la taille ſvelte ; les mouvements expreſſifs ; une de ces phyſionomies piquantes, qui plaiſent autant & plus que la beauté : l’irrégularité même de quelques-uns de ſes traits y donnoit un jeu ſurprenant… Son air fin, ſéduiſant quelquefois, devenoit fier, dédaigneux quand elle le vouloit, & elle le vouloit ſouvent. Madame de Saintal lui connoiſſoit beaucoup de ſang froid, de fermeté d’ame, & cette faculté rare chez les jeunes perſonnes, de ſavoir ſe décider dans quelque occaſion que ce pût être. Elle n’ignoroit pas combien, ſur tout cela, je différois de ma ſœur… Gaie, vive, étourdie, franche par caractere, diſſimulée par éducation ; mais oubliant volontiers les leçons que j’avois reçues pour me livrer à mon naturel ; facile à perſuader, plus encore à ſéduire par le goût, l’exemple, ou la nouveauté… J’avois beſoin d’être arrêtée, d’être conduite : Mademoiſelle d’Aulnai étoit plus faite qu’une autre pour y réuſſir ; mais il falloit que je ceſſaſſe de la mortifier par des comparaiſons toutes au profit de ma vanité, que je priſſe de la confiance en elle, que nous nous aimaſſions enfin ; & nous en étions l’une & l’autre à mille lieues. Madame de Saintal ne s’effraya point des barrieres qui nous ſéparoient : elle eſpéra les renverſer, en donnant quelque choſe à l’ha-