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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/38

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des vues ſur lui. — Il ne feroit pourtant pas impoſſible qu’elle en eût d’autres, reprit-elle ; mais en ſuppoſant que vous épouſiez le Comte, êtes-vous ſûre que vous l’aimerez ? — Quelle demande ! Il eſt charmant !… J’en ſerai folle. — Et s’il ne vous aimoit pas ? — S’il ne m’aimoit pas ! le doute eſt ridicule… Je ſuis cent fois plus jolie que je ne l’étois quand je lui ai plu. — D’accord ; mais s’il aimoit ailleurs ? — Je le rendrois infidele. — Et ſi vous n’y parveniez point ? Oh ſi, ſi, dis-je impatientée… Je courrai les riſques de toutes celles qui ſe marient ſans ces calculs, & qui ſont fort contentes de l’être… Tenez, avec de la fortune, une bonne maiſon, des compagnies agréables, la liberté de ſatisfaire ſes goûts, on a très-peu de chagrins à redouter. Je ne ſuis point de cet avis, repliqua ma ſœur : tout cela eſt bon ; mais il me ſemble qu’il me faudroit autre choſe pour être heureuſe. Je voudrois aimer, je voudrois être aimée, beaucoup, excluſivement : ce feroit le plus riche, le plus grand Seigneur de France, que je ne l’accepterois pas ſans cette condition…

Ce jour même nous reçûmes la viſite du Marquis, aux yeux duquel je n’omis rien pour paroître aimable, & j’y parvins. Un tel ſuccès, qu’il ne me laiſſa point ignorer,