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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/104

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nous unit… Ce ſont les articles de notre mariage. Rozane prodigieuſement ému, s’approcha, voulut parler, & ne put que baiſer la main de ma mere.

Quelques jours après nous légitimâmes un amour qui, depuis tant d’années, avoit fait le charme, le tourment & le reproche de notre vie.

Le lendemain de notre mariage, dans un de ces moments paiſibles, où le cœur ſeul atteſte l’exiſtence de l’amour, je demandai au Comte s’il lui reſtoit quelques vœux à former ? Oui, me répondit-il, celui d’aſſurer la durée de notre bonheur. Qu’entendez-vous par l’aſſurer ? demandai-je encore. Je ne vois que la mort capable de la détruire, puiſqu’elle ſeule déſormais peut nous arracher l’un à l’autre. Il eſt vrai, reprit-il, qu’aucun pouvoir humain ne ſauroit rompre les nœuds charmants que nous avons formés ; mais c’eſt par la raiſon même qu’ils ſont indiſſolubles, que nous devons nous appliquer ſans ceſſe à les embellir… Il faut que ce ſoit toujours pour nous des chaînes de fleurs, & non un joug dont la peſanteur feroit gémir notre foibleſſe.

Ce début me ſurprit, me bleſſa… J’allois interrompre Rozane : il s’en apperçut, & me prévint. De grâce, me dit-il, ſuſpendez votre jugement, ſoyez sûre que je