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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/111

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pléer… Je vis l’aimable aiſance dégénérer en une familiarité choquante… Je vis l’aigreur, le dégoût, les inattentions, l’humiliante inégalité, tous les défauts deſtructeurs des aſſociations, s’emparer des maris & des femmes qui ſe piquoient le plus de vertu. Je les vis enfin, ſi différents de ce qu’ils avoient été, qu’ils n’auroient pu continuer de s’aimer que par une ſorte d’inconſtance. Il me parut ſi difficile d’éviter ces inconvénients, qu’ils m’auroient infailliblement dégoûté du mariage, ſi j’avois pu chaſſer ton ſouvenir ; mais ce ſouvenir impérieux venoit effacer les nuances rebutantes de ces tableaux : il m’en offroit d’enchanteurs, auxquels mon ame s’attachoit toute entiere… Sans le vouloir, je formois, pour tous deux, des plans de vie capables d’éterniſer notre tendreſſe. Mon ſyſtême me raviſſoit. Je croyois au bonheur ; je le voyois, mais dans une région qui m’étoit inacceſſible.

Dès que le retour de mes eſpérances m’eut perſuadé que je pouvois encore y prétendre, je raſſemblai les réflexions que j’avois faites ſur cette matiere, j’y mis de l’ordre… Ce ſont elles que je t’ai communiquées : ſeroit-il poſſible que tu les déſapprouvaſſes ?… Ne ſommes-nous pas aſſez heureux pour travailler à l’être toujours également ?