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Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/25

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il ſe trouvoit. Son air, ſon regard avoient quelque choſe d’enchanteur ; mais d’indéfiniſſable… J’en fus troublée au point de ne ſavoir plus ce que je devois dire ou faire pour réparer mon indiſcrétion, dont je compris toute l’étendue… Laiſſez-moi, laiſſez-moi, lui criai-je : ne vous ſuffit-il pas de faire mon plus cruel ſupplice, faut-il encore que vous me rendiez inſenſée ?

De grace, rappellez vos eſprits, me dit-il, avec beaucoup de douceur ; voyez ſi l’excès de votre affliction ne vous fait pas prendre le change… Seroit-ce bien à moi que vous auriez deſſein d’adreſſer vos reproches ? Par où ? comment les aurois-je mérités ?

Il tenoit mon bras, s’efforçoit de déplacer le mouchoir dont je me couvrois les yeux ; je réſiſtois, & fis même un geſte pour le repouſſer, qui m’attira de nouvelles inſtances : elles étoient ſi preſſantes, ſa voix ſi tendre, ſi émue, que le déſordre de mon eſprit en fut porté à ſon comble. Eh mon Dieu ! dis-je, ceſſez de me perſécuter… Que prétendez-vous ?… Je veux me taire, & mourir de honte d’en avoir trop dit.

C’eſt donc à moi de parler, dit-il, en s’aſſeyant : tout ce que je vois, tout ce que j’entends, m’y détermine… Il va m’en coûter infiniment pour vous faire des aveux,