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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/242

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La prude juge la coquette et en est persiflée ; c’est en peu de mots votre histoire. L’homme à principes vous juge au pire, mais vous ne croyez pas l’homme à principes. Le vulgaire toujours séduit par de vertueux démagogues, ne peut être apprécié par vous, qui ne croyez pas à la vertu. Il n’est permis de vous condamner que par vos principes, comme un criminel par les lois ; mais ceux qui en connaissent le raffinement ne trouvent dans votre conduite rien que de très simple. Cela revient donc à ce que nous avons dit que, dans toute espèce d’affaire il faut d’abord s’entendre, et puis raisonner avec flegme. Vous avez d’ailleurs par devers vous une sous-défense non moins victorieuse, car vous n’aspirez pas à la réputation de Caton ou de Catinat : il vous suffit d’être comme un certain monde, et dans ce certain monde, il est convenu que celui qui peut avoir de l’argent et qui n’en profite pas, est un nigaud ; car l’argent procure tous les plaisirs des sens, et les plaisirs des sens sont les seuls estimables. Or, M. de Choiseul, qui était très libéral, ne vous permettait pas de lui résister, lorsque surtout votre ridicule patrie vous payait de vos services, selon sa plaisante coutume, par l’honneur de la servir.

Le traité de Compiègne conclu, M. de Chauvelin et vingt-quatre bataillons débarquèrent sur nos bords. M. de Choiseul, à qui la célérité de l’expédition importait majeurement avait des inquiétudes que, dans